Dans ce nouvel épisode de NOIR & BÈGUE 🎙, nous verrons comment sortir de sa zone de confort. Dans ce cas précis, il s’agit d’entreprendre, créer une entreprise en étant en situation de handicap (ici le bégaiement).
Être à la tête d’une agence de communication sonnerait presque comme un oxymore. C’est pourtant possible.
En France, on compte de 75 000 chefs d’entreprise en situation de handicap, ce qui est un nombre assez conséquent et montre que le monde de l’entreprenariat reste accessible malgré tout.
Voir des portes se fermer, à cause du handicap, mais pas que. Les refus, les bashs, les rejets comme on les appelle sont déjà nombreux en temps normal. Une personne handicapée va en rencontrer beaucoup plus nombreux durant sa construction.
Cependant, devenir entrepreneur en situation de handicap requiert une certaine préparation en amont. Ici, dans le cas du bégaiement, la préparation va principalement concerner les interactions avec autrui, le démarchage et tant d’autres situations. Les échanges peuvent être source de stress pour beaucoup d’entre nous, ils le sont davantage pour une personne atteinte de bégaiement. C’est pour cette raison qu’absolument tous les appels, les conversions et les réunions doivent être planifiés au préalable.
Retrouvez les notes de l’épisode sur noiretbegue.fr
🎧 Bonne écoute
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Mike
Bonjour et bienvenue à tous sur ce nouvel épisode qui s’intitule Le Communicant Bègue. Bonjour Mazarine !
Mazarine
Bonjour Mike, ça va.
Mike
Très bien et toi ?
Mazarine
Prêt pour ce nouvel épisode.
Mike
Toujours chaud
Mazarine
Tout pareil, alors aujourd’hui, comme le titre de cet épisode nous l’indique, on va parler d’un communicant bègue qui est donc toi ?
Mike
Ah bon ? Il n’y a pas d’invités aujourd’hui ?
Mazarine
Pour aujourd’hui malheureusement, et comme nous le savons déjà, notamment grâce aux épisodes précédents, être bègue, c’est déjà une difficulté conséquente pour toi. Et en plus de ça, tu travailles dans un secteur ou dans un métier ou la parole est plus que nécessaire. Dans le secteur de la communication, donc. Et est-ce que tu pensais être destiné à faire ça plus jeune ou pas ?
Mike
Au début, j’ai toujours pensé que je n’étais pas destiné à ça. C’est un peu comme si tu prenais une clé USB formatée Windows que j’essaye de faire fonctionner sur Mac. Donc là pour les geeks. Ouais, mais plus sérieusement, non, je ne pensais pas du tout destiné à ce métier, en tout cas tel que je le fais aujourd’hui. J’ai toujours fait des choix, disons stratégiques par rapport à mon bégaiement.
C’est d’éviter tout ce qui peut m’exposer, tout ce qui va me ridiculiser. Donc forcément, quand j’étais au lycée, le choix de faire de la comptabilité alors que je détestais ça, c’était ça. Et j’ai fait de la compta. Et après, une fois le bac en poche, j’ai voulu continuer. Et puis les choses de la vie ont fait que ça ne se passe pas tel que je voulais.
Et là, je fuis. Je n’ai fait vraiment rien. J’ai pris un an, un an pour réfléchir, mais je travaille à côté. C’est vraiment le but, c’est de faire le point sur ma vie. Qu’est-ce que j’ai vraiment envie de faire ? C’est à ce moment-là que tes 10 15 ans. C’est en fonction des choix que tu vas faire.
Là, je me suis dit est ce que je vais toujours faire les mêmes choix que j’ai fait, qui vont me garder dans une planque ou je répète j’ai une passion. J’ai toujours été passionné de cinéma et de vidéo. C’est à ce moment-là que j’ai pris la décision que j’allais, que j’allais me diriger vers ça, que j’allais me diriger vers des études de cinéma.
Et et par la force des choses, c’est ce qui s’est passé honnêtement. C’est l’un des meilleurs choix que j’ai fait dans ma vie, sinon je ne serais pas là et je suis très content de faire ce que je fais. Les différents choix qu’on fait dans la vie ont des conséquences et aujourd’hui, je suis la conséquence des choix que j’ai faits il y a une quinzaine d’années.
Ces choix-là, je ne regrette absolument pas. Même si le fait d’avoir fait ce choix a engendré d’autres obstacles. Mais il fallait vivre ces obstacles. Il fallait surtout les affronter et les affronter au quotidien. Et et j’avance à petits pas.
Mazarine
Et pourquoi avoir choisi la comptabilité sport pour l’amour des chiffres ?
Mike
Un non du tout. Les chiffres ? J’aime bien quand je vois sur mon compte, mais je n’aime pas les chiffres et la compta. Désolé, c’est mon comptable m’entend, mais je déteste ça donc je déteste la comptabilité. Ce n’est pas que je déteste la comptabilité, mais je n’étais pas passionné par la comptabilité. J’avais vraiment envie de faire un métier qui me fait rêver.
J’avais envie de faire un métier qui pour moi avait un sens. Et le cinéma pour moi, c’était aussi une réalité parallèle. J’ai très peu rêvé dans ma vie. Et le cinéma pour moi, ça me permettait d’aborder une réalité qui était dans ma tête. Ça me permettait aussi de sensibiliser sur des sujets, notamment le bégaiement que j’ai facile, mais aussi les violences faites aux femmes que j’ai faites un film.
Et là, j’ai d’autres sujets ou dans le futur, j’aimerais traiter et j’ai ce pouvoir là de pouvoir créer, créer une œuvre de l’esprit. Alors pour moi, c’était vraiment un gros challenge. Pour moi, c’était vraiment un gros challenge de faire tout ce que j’ai fait dans mon métier à travers mon imagination. Le cinéma, pour moi, c’est vraiment une arme pour sensibiliser.
Et en parallèle de ça, j’ai été très attiré par la vie d’entreprise, par le milieu corporate et de fil en aiguille, FILMCORPORATE était née. Et c’est un plaisir pour moi en tout cas d’évoluer dans ce monde corporate.
Mazarine
Du coup, tu vis de ta passion. Aujourd’hui.
Mike
C’est un plaisir énorme. Tous les jours, je me dis je me lève le matin et je fais un métier que j’aime tous les jours. Je me lève le matin, je me dis que la vie est belle, que c’est n’est pas un calvaire pour moi de me lever le matin pour venir au bureau. Donc, comme je le dis souvent, c’est ma deuxième maison.
Donc moi l’agence. Et voilà, c’est ma passion, c’est une partie de moi, donc c’est ma vie. Je fais un métier qui pour moi a un sens, je fais un métier ou quand je vois l’impact qu’on a sur sur nos productions auprès de nos clients, quand les qu’on les aide à atteindre leurs objectifs, là tu te dis wow ! Je fais un métier qui a un sens, c’est pas uniquement le financier qui m’intéresse.
Moi, ce qui m’intéresse d’abord, c’est le challenge, c’est d’atteindre des objectifs. On part de zéro et on va atteindre le chiffre qu’on s’est imposé, vu que toute ma vie, ça a été une vie de challenges. Et puis, dans mon métier, je retrouve donc ce côté un peu de challenge.
Mazarine
La suite logique des événements.
Mike
Voilà, c’est tout à fait logique. Donc j’aime bien les challenges. Ce qui me plait vraiment dans tout ce que je fais, c’est que je ne vis pas la même journée tous les jours.
Chaque lieu est différent, chaque projet différent, avec ses problématiques aussi. Et c’est vraiment un challenge. Après, moi ce qui me fait qui aujourd’hui, c’est toute part d’une idée, tout part d’une réflexion et c’est ça qui est intéressant, c’est de faire fonctionner ses neurones et faire des brainstorming avec des collègues, avec les clients.
Mais cette recherche de créativité qui moi me passionne et c’est ça qui me plaît aujourd’hui et que nous on vend. Mais quelque chose qui n’est pas physique, c’est quelque chose qu’on va venir matérialiser. Après, en amont, c’est d’abord dans nos cerveaux et après, il faut arriver à l’expliquer. Et c’est là que la parole intervient en tant que communicant.
Et du coup, arriver à le pitcher et arriver à faire voyager les gens, à arriver à expliquer ton concept, expliquer tes idées, des idées, des réalisations et comment on imagine le projet, quelle est l’histoire racontée et quel est le storytelling ? C’est oui, c’est ça. C’est vraiment pour moi une passion et j’aime raconter les histoires. Aujourd’hui, je raconte des histoires à travers les activités de nos clients.
Mazarine
Du coup, si je ne pensais pas destiné à la communication, à quoi tu pensais destiné ?
Mike
Rien. Je ne tiens bon à rien, je plaisante. Ça fait, c’est violent quand même, non ? Je me cherchais, je me cherchais, mais, mais je me cherchais. Et grâce à ma passion, tu sais quand tu commences quelque chose. Je me suis toujours concentré sur une étape après l’autre. Quand j’ai commencé même ce métier il y a quinze ans, je ne pensais pas qu’aujourd’hui j’allais être un communicant vidéo.
Je savais que j’allais faire de la vidéo, mais je ne savais pas vraiment qu’elle forme mon métier à les prendre. Donc c’est au fur et à mesure des ans, au fur et à mesure des projets, au fur et à mesure de l’évolution de mon agence. Aussi que tu te trouves une identité, que tu te trouves un positionnement, que tu te trouves une niche ou tu te trouves une vraie valeur ajoutée par rapport à ce que tu peux apporter sur le marché.
Donc, c’est vraiment ce qui a fait que moi, mon métier s’est dessiné au fur à mesure, au fur à mesure des ans. Il y a quinze ans, je ne faisais pas du marketing, aujourd’hui le marketing, mais j’en fais tous les jours, donc c’est ma passion de la vidéo et du marketing, tous les réunis et qui fait qui je suis aujourd’hui professionnellement.
Et les choses ont vraiment évolué avec les temps et pour moi, c’est tout bénef.
Mazarine
Mais du coup, comme le nom de l’épisode l’indique, le communicant bègue aujourd’hui du que tu es à la tête d’une agence de communication, on sait très bien que la parole a une place centrale dans ce métier, dans ce secteur de métier. Comme tu le dis, tu as besoin de communiquer, de parler avec les clients, avec les clients, que ce soit pour pitch, que ce soit pour les idées que ça faut, pour les retours et j’en passe.
Mais est-ce que pour toi, ça représente une difficulté aujourd’hui de devoir parler autant ? Est-ce que ça représente toujours un effort physique avec le bégaiement ?
Mike
Plus mon métier, ça fait une dizaine d’années que je le fais de la difficulté. Allez, voulu avec le temps, au début de mon métier, je parlais très peu, donc j’étais dans une zone de confort ou j’avais privilégié l’écrit.
Et au fur et à mesure des ans. Et c’est là que je me suis dit que si je devais faire grossir mon business, si j’allais vraiment développer, la parole va être primordiale parce que je m’étais très vite rendu compte qu’on était en été très vite mis dans un rôle déguisé, et que pour arriver à passer ce type là, pour arriver à passer ce cap-là, il fallait arriver à mieux se vendre et il fallait arriver à mieux s’expliquer.
Il fallait arriver à mieux se faire comprendre. Il fallait vraiment arriver à un stade ou la parole, ou ou le pitch ou tout ce que tu vas faire soit beaucoup plus impactant. Aujourd’hui, la parole me demande toujours autant d’efforts, mais plus de la même façon. C’est plus des efforts physiques comme avant ou j’ai bloqué les efforts que ça me demande.
Aujourd’hui, c’est beaucoup plus des efforts de préparation. On fait des efforts pour structurer mes idées, pour travailler mes présentations. C’est beaucoup plus. C’est beaucoup plus sur cet axe-là que ça demande de l’effort malgré tout, même si j’ai une parole fluide aujourd’hui.
Mais je reste un bègue, je le reste toujours. Mais j’ai développé un tas de technique qui me permet de mieux m’exprimer, de m’exprimer librement.
Sauf que, en fonction des enjeux, je vais adapter mes techniques. Je vais l’adapter aussi par rapport à mon état d’être. Et comme je le disais sur les précédents épisodes, c’est ça qui dépend comment je me sens. On retourne toujours sur son état naturel. Moi, aujourd’hui, prendre la parole.
Donc c’est toujours un plaisir. Malgré qu’aujourd’hui j’ai une parole fluide, ça me demande toujours un certain travail pour mieux maîtriser la parole.
Mais tout va dépendre des enjeux. Je ne fais pas le même travail quand j’ai une présentation à faire, je ne fais pas le même travail. On fait une simple conversation Zoom ou Skype Teams tout ce que tu veux. Mais le plus important pour moi, c’est d’arriver à m’exprimer de la plus belle façon possible, tout simplement. Mais la parole est quasiment centrale.
Elle est primordiale, en tout cas dans mon métier tel qu’il est aujourd’hui, la parole est indispensable. Cette parole, elle ne coûte pas comme avant, avant la parole, me coûtait physiquement la parole, c’est qui me coûtait beaucoup d’émotion. La parole me coûtait sur mon état d’esprit, sur ma façon d’être. La parole m’écouter psychologiquement même parce que la parole, pour moi, c’était lié à quelque chose de négatif.
Il y a une douleur, il y a un bagage émotionnel qui était trop important avec le mot parole. Dans mon métier, aujourd’hui, j’ai pu transformer ce bagage émotionnel là en motivation et me dire que la parole m’aide à aller chercher ça. Donc la parole m’aide à mieux passer mes idées. J’ai changé ma façon de travailler avec ma parole, donc c’est ça qui est intéressant.
Moi, aujourd’hui, la parole, elle est centrale, je l’ai laissée plus de place et si je me suis mis en danger, je vais te donner un exemple qui est toute bête quand tu fais les mêmes actions, tu auras les mêmes résultats. Avant, je faisais les mêmes d’actions, pas forcément. J’avais les mêmes résultats. Au fur et à mesure du temps, je me suis dit les résultats que j’ai en face de moi, ça ne me va pas.
Il fallait que j’arrive à sortir de cette zone de confort là. Et pour sortir de cette zone de confort là, il y avait la parole, dit OK Mike, là tu fais ça, tu fais ça. Mais au fond de toi, tu sais que tu ne vas pas au bout. Au fond de toi, tu sais que tu as un potentiel que tu n’exploites pas parce que tu as peur.
Mazarine
Aujourd’hui, on a de plus en plus de meetings qui se font en distantiel, vision, etc. Est-ce que tu te prépares aussi autant à ses meetings qu’à un meeting physique ? Est-ce qu’ils sont tout aussi stressants pour toi que les autres ou non ?
Mike
Elle est intéressante ta question. Ce que j’aime bien, c’est le bon contact physique adapté avec le covid. Tout le monde s’est adapté, mais c’est vrai que j’ai une préférence à voir la personne en face de moi. Il y a un lien qui est beaucoup plus fort qu’à travers un écran. Après, on fait avec. Ça ne me demande pas la même préparation.
C’est une préparation qui est différente. Je me suis rendu compte que du côté de moi, par exemple, j’ai un rituel avant de faire une vidéo, il me faut mon Redbull qui est bien frais. Mais c’est vrai, non, je ne sais pas. Je ne fais pas de visio si je n’ai pas mon Redbull ou mon Coca citron.
Non, mais c’est vrai, mais ce n’est même pas pour rigoler. Et sauf que j’ai besoin de boire quelque chose de frais. Moi, le fait d’être assis, je suis moins à l’aise. Donc je suis beaucoup plus à l’aise quand je suis debout parce que mon corps a besoin de bouger au niveau de ma gestuelle, etc. et l’inconvénient que j’ai avec Skype.
Tout ce que tu veux c’est je dois rester dans le champ de la caméra alors que quand tu es en face de moi, je peux me permettre. J’ai un peu plus de liberté et que là du coud. Donc le fait d’être dans un périmètre qui est limité pour moi en tant que bègue, en tout cas qui a besoin de faire des mouvements, je dois accompagner ma parole.
C’est un peu plus embêtant, mais en soi, je me suis adapté. Mon fameux rituel d’avoir des boissons fraîches. Je vais avant le col, je vais déjà adapter la posture, etc. et avoir mon petit calepin pour prendre les notes. Mais, mais à choisir, non, je préfère. Je préfère donc le rendez-vousce que je trouve, qui est quand même beaucoup plus sympa.
Et après, aujourd’hui, on a des clients ou on n’est jamais vu. C’est un peu bizarre, notamment d’un client. Ça fait cinq ans, on ne s’est jamais vu. Du coup, on se voit que c’est vrai qu’à travers un écran. Mais c’est drôle, mais c’est ça. Mais c’est comme ça. C’est le monde actuel dans lequel on vit et je pense que je pense qu’on aura l’occasion de se rencontrer en vrai.
Mazarine
Un jour, peut être.
Mike
Un jour, peut être aussi, mais c’est différent. C’est vraiment, c’est vraiment différent. Et tu as des personnes qui ne sont pas à l’aise devant un écran face caméra. Mais je pense que pour certains bègues, ça doit être aussi déstabilisant. Donc m’aurait dit la visio il y a dix ans coco ça me plait pas trop. Donc ça reste un travail différent du face to face.Mais c’est aussi intéressant le.
Mazarine
Challenge aussi ou un.
Mike
Challenge ou tout autre challenge. Pas moi du moment ou j’ouvre la bouche lâche par la parole. Tu ne te rends pas compte que c’est des années et des années de technique, etc., mais tout est challenge.
J’aime les challenges, il n’y a pas pour moi des grands ou petits challenges, c’est une somme. Donc c’est la somme des résultats qui font que j’avance et je n’ai pas ce rapport.
Forcement à la grandeur que tout d’être grand c’est de bâtir petit à petit, brique par brique. Il n’y a pas des plus grandes ou plus petites victoires. Toutes les victoires et tout est bon à prendre. C’est la somme de tout ça qui font que tu avances.
Mazarine
Et sinon, avant tout, lancé dans l’univers de la communication et de fonder ta propre agence, est-ce que tu avais des appréhensions et au bégaiement ou pas ?
Mike
Les emplois sur le monde de la TV ? Je n’ai pas attendu d’entreprendre pour savoir que ça allait handicapé.
Non ? C’est logique. Après, quand je me suis lancé dans l’entrepreneuriat, j’étais déjà dans l’optique de me battre avec, que je combatte avec C’était d’arriver à mieux. Le maitriser, c’était d’arriver à le faire à une place le plutôt possible.
Mais oui, c’est. Cette appréhension était déjà présente après l’appréhension. Le but, c’était d’arriver quand même à atteindre les objectifs. Et malgré malgré le stress, malgré la pression et tout ce que tu veux.
Mazarine
Est-ce que tu as dû faire face à des situations de stress ? Si oui, est-ce que tu peux nous en citer quelques-unes.
Mike
Des situations de stress ? Une, j’en ai vécu. En dix ans de métier, des situations de stress jouant à la pelle avec des centaines de milliers de situations.
Mazarine
Pour moi, ça fait quelque.
Mike
J’ai plus autant donné une. Par exemple, je me souviens, à une époque, on m’avait invité dans un événement d’entrepreneurs locaux et le fameux tour de table ou chaque boîte va se présenter. Oh mon Dieu ! Et là, tu veux que je ne sais pas que le monde s’arrête ? Et c’est vraiment horrible. Le tour de table, ce stress, cette pression-là sont imposants.
La guillotine arrive et tant bien que mal, il fallait que je me présente. Et quand tu te présentes ? Eh oui, bonjour, je suis bègue, c’est normal, non ? Donc tu fais ta présentation, etc., mais je me sentais mal et je me sentais mal et tu sais.
N’empêche, tous les autres événements comme ça, je n’en ai quasiment pas fait après, parce que je ne me sentais pas à ma place, parce que j’avais ce stress là de la fameuse guillotine.
C’est bientôt ton tour. Tu parles pendant plusieurs années, je n’en ai pas fait. Et il y a quelque temps, on m’a réinvité dans un événement similaire et je le fais plutôt avec plaisir.
Après, ce qui m’a plutôt dérangé ou c’est beaucoup plus. Je suis beaucoup plus à l’aise debout. Je suis beaucoup plus à l’aise quand j’ai une liberté de au niveau de ma gestuelle que l’on est assis.
Les gens, je ne les connais pas forcément, mais après, en fois, non, je n’ai pas bégayé. J’ai fait mon petit pitch, mais je suis cadre un peu comme ça, un peu trop formel, qui me plait un peu moins, mais.
Mais j’ai plus ces difficultés-là que j’avais avant, notamment dix ans en arrière. Je me souviens bien de ces jours-là, c’était assez grave et je n’oublierai pas.
Mazarine
Gravé dans la tête.
Mike
Peut être que certains vont me reconnaître et tout à fait de gagner. Ne vous inquiétez pas.
Mazarine
C’est une très bonne question. Comment tu as fait pour avoir une parole plus fluide, pour pouvoir réussir à t’exprimer en public et de manière plus consciente ?
Mike
C’est un travail qui se fait sur plusieurs années. C’est un peu comme le foot. Tu deviens bon à force de jouer des matchs si tu es chez toi et tu joues pas, tu ne vas pas perfectionner.
Moi c’était pareil. Donc si je jouais dans telle ou telle courbe, il va falloir que je m’entraîne. Va falloir que je passe sur tous les matchs parce que je peux m’entraîner.
Mais si je ne fais pas des matchs pour moi, les matchs, c’était de venir devant un auditoire. Pour moi, les matchs, c’était de venir faire une présentation. Pour moi, les matchs, c’est d’aller convaincre un prospect, c’est ça. Pour moi, les matchs, je m’entraînais tous les jours.
Après, fallait les jours de match et les jours de match. Si l’appel d’offre était de venir et de la défendre, c’est vraiment les heures de match après match, c’est à des matchs, c’est la Champion’s League en fonction des zéro virgule ou du client.
Les enjeux ne sont pas les mêmes, les gens ne sont pas les mêmes. C’est et là je suis là. Je me souviens généralement, mais quand je l’ai sur ce type de présentation, je mets tous les. Je mets tous les éléments de mon côté. Je dois bien dormir la veille, que je sois en forme, je dois avoir une chemise bien repassée.
Tu vois. En fait, c’est tous les petits détails qui vont même au-delà de la parole, mais qui font que le gars qui va venir au match, il ne va pas oublier son maillot, ses protections.
Moi c’est pareil. Je venir avec une belle chemise bien repassée, la barbe bien taillée, je dois me sentir bien.
Et quand je suis bien comme ça donne moi, le micros et c’est parti, c’est rage. La droit au but sur moment. Moi je ne suis pas droit au but on est Parisiens. On voit excusez moi des Marseillais, mais je suis parisien.
Ici c’est Paris, mais et c’est un plaisir de dans ce but d’ailleurs il faut que je change cette expression là.
Mazarine
Je prends ça au pied, on le coupe au montage.
Mike
On va laisser là. J’adore Marseille donc c’est une belle ville. En plus je retourne bientôt.
Mazarine
Et pour dériver un peu sur la gestion de ton agence, j’ai envie de savoir. Est-ce que lors des dix dernières années, tu as déjà eu à faire des clients qui ont tenu des propos désobligeants envers toi, notamment à cause du bégaiement qui peut-être ne faisait pas confiance ou qui n’était pas patient ?
Mike
Je pense qu’on a les clients qu’on mérite. Moi, j’ai la chance aujourd’hui d’avoir des clients bienveillants. Je n’ai pas connu de situation ou un client va me faire une remarque désobligeante par rapport à mon bégaiement.
Non, c’est, je n’ai pas, je n’ai pas rencontré cette problématique, je ne l’ai jamais rencontrée. Je pense même que je ne vais pas rencontrer, du moins avec mes clients, que la difficulté pour moi se situe plutôt en amont quand on ne se connaît pas.
Donc c’est comme on dit un peu. C’est la première impression qui est bonne. Le but pour moi, c’est d’arriver malgré tout à faire la meilleure impression dès le début. Mais les gens, en tout cas que je rencontre, avec qui je travaille au quotidien, mes partenaires, mes clients, je rencontre des personnes bienveillantes.
Et le bégaiement, pour moi, c’est un handicap, certes, mais avec tout ce que j’ai mis en place, ce n’est pas un frein.
Mais avec mes clients, on parle bégaiement. Il sensibilise aussi. Toute façon, ça s’entend. Il y a des clients qui ne savent même pas que je bégaie parce qu’en fonction, ça va dépendre des clients, du temps que je passe avec eux, en présentation ou en atelier, etc. Après, je peux avoir un ou deux blocages par-ci par-là.
Mais dans l’ensemble, la difficulté se situe beaucoup plus au début de ma carrière. Aujourd’hui, je suis beaucoup plus à l’aise avec la parole, mais ça m’arrive encore de bégayer quand je suis en rendez-vous, client ou autre. Mais, mais comme je le dis toujours E+R=E. Ça, ça me chagrine moins que.
Et qui a dix ans ou je me dis merde, est-ce que je peux avoir le deal à cause de ça ?
Non, non, c’est j’ai pas et j’ai. Et en tout cas j’ai la chance d’avoir des clients bienveillants et un entourage bienveillant. Et puis comme je dis, si une personne me fait des remarques désobligeantes, tant mieux, je ne travaille pas avec elle, donc je choisis les personnes avec qui je travaille.
Donc au-delà du rapport financier, il y a ce rapport de respect.
Pour la même façon que je ne vais pas travailler avec un raciste pour la même façon que je ne vais pas travailler avec une personne qui n’est pas respectueuse. Donc on choisit ses clients donc on a les clients qu’on mérite.
Donc moi si je suis bienveillant envers les autres, donc je reçois en contrepartie cette bienveillance-là.
Mazarine
Est-ce que tu préviens au préalable que tu bégaies ou pas ?
Mike
Honnêtement, non. Je n’ai jamais voulu faire ça. J’ai beaucoup discuté avec mon orthophoniste à l’époque, qui me disait que c’est peut être quelque chose de libératoire aussi. Ça permet de poser un cadre. Mais je pense que je n’ai jamais voulu un peu par honte. Pour être tout à fait honnête, je n’avais pas envie que j’avais l’impression de me victimiser.
Le fait de dire que je suis bègue quand j’arrive, que la première chose que je dois dire, c’est que je suis bègue. J’avais l’impression qu’il fallait mettre un peu mon message en second plan et que la personne allait se focaliser que dessus et j’essayais tant bien que mal d’essayer de le cacher, le maximum possible, de le gommer.
Mais non, je n’ai jamais eu ce courage là de l’exprimer pleinement, mais ça ne m’a pas empêché par la suite de parler de mon bégaiement.
Mais en tout cas, je l’ai exposé, pas dès le premier rendez-vous. En gros, tu rencontres une nana, on se marie. Il faut faire connaissance un peu. Moi, c’est un peu pareil, donc je voulais parler, je voulais parler trop fort.
Mazarine
On peut dire que c’était à peu près une manière de donner une place centrale au bégaiement, alors qu’en soit, on va dire pas tellement sa place dans le deal ou dans la relation client.
Mike
Mais je n’avais pas envie de mettre mon handicap sur la table. C’était si, si, ça se remarque, ça va se remarquer. Mais si ça ne se remarque pas, ça ne se remarque pas. C’était vraiment parce que le fait de le mettre sur la table, pour moi, ça allait être une source supplémentaire de stress, de pression. C’était une façon pour moi un peu de me dédouaner.
Si je n’arrive pas à convaincre de dire oui, c’est à cause du bégaiement. Et je n’ai jamais utilisé le bégaiement comme prétexte ou même le fais d’être noir comme prétexte de dire que je n’ai pas eu ce deal-là parce que j’ai bégayé. Si j’ai pas eu ce deal, c’est parce que je n’étais pas suffisamment bon point. Même si j’ai. Tant pis, j’essaye toujours de ne pas faire porter ce poids de l’échec ou autre sur ce facteur. Sur ces deux facteurs que je viens de citer.
Mazarine
Est-ce que selon toi, le bégaiement a déjà eu un impact sur tes deals, tes collaborations ? Est-ce que tu as déjà eu des clients qui ont refusé de travailler toi pour cette raison ou bien.
Mike
De façon directe de le gérer ? Clairement, non. Après, si ça peut influencer, oui, je pense. Après, quand tu fais une mauvaise présentation, quand tu ne t’exprimes pas correctement, quand tu ne vas pas au bout de tes idées parce que tu as des blocages ou parce que tu vas changer tes mots, tu ne vas pas utiliser les mots que tu voulais.
Donc, entre ce que tu as préparé sur ton petit bout de papier et ce qu’il y avait dans ta tête et ce que le client entend ou ce que le prospect il entend en avoir, donc pas forcément, tu peux avoir une détérioration de ta communication, mais après ça fait partie et ça fait partie de la vie d’un bègue.
Ça fait partie de la vie d’un communicant bègue.
Tu ne gagnes pas tous les coups à l’âge. Si je n’ai pas gagné, importe peu parce que je me dis tu sais comment on est sur terre avec des milliards comme une entreprise à des millions, si ce c’est pas lui, ça serait une autre personne. Donc j’essaie toujours de dédramatiser comme ça. Et puis continuer d’avancer.
Je ne peux pas être bon à tous les coups, mais ce qui est important au-delà de ne pas avoir le deal, c’est qu’est-ce qui m’a manqué ?
Est-ce que c’est la structure aussi, la parole ? Si c’est la parole, OK, là je vais mieux travailler, anticiper mes blocages, etc., je vais mieux travailler mon élocution par exemple. Un truc tout bête est ce que je me suis bien préparé ?
Pas forcément qu’au niveau du pitch que j’allais faire, mais au niveau de mon état, comment j’étais en fait, comment j’étais à ce moment-là ?
Est-ce que j’étais bien ce que j’avais médité ? Est-ce que j’avais bu avant ? Parce que j’ai tendance à beaucoup parler fort quand et quand je suis sur des présentations, ça peut durer, ça demande une énergie.
Et ce est-ce que ma préparation physique, un peu comme je t’ai dit tout à l’heure et je vais jouer un match. Est-ce que je m’étais entraîné la veille ?
Est-ce que j’avais bien dormi ? J’essaye de voir un peu tout, tous les petits facteurs autour qui ont pu influencer.
Pour moi, le but, c’est d’améliorer, c’est d’améliorer à mon prochain match. Un match, ça se gagne, un match, ça se perd après. Donc la compétition continue. Ça fait partie du jeu. On ne gagne pas à tous les coups.
Ce qui est intéressant, c’est ce que j’ai. J’ai fait un travail sur deux volets à la fois sur le volet personnel, mais aussi sur le volet professionnel. Moi, quand j’ai commencé ma reprogrammation il y a une dizaine d’années. Mais cette reprogrammation, elle devait toucher ces deux volets-là. Je pourrais m’améliorer au niveau personnel, avec mon entourage, mes amis. C’est mon cercle fermé.
Il fallait que professionnellement, que je puisse aussi avoir certains résultats. Professionnellement, je n’avais pas les mêmes challenges. Il fallait que professionnellement, je puisse avoir aussi certains résultats.
Donc c’était vraiment un parcours d’amélioration que je faisais au quotidien. Aujourd’hui, moi, j’ai la chance de faire un métier ou je fais énormément de rencontres. Par exemple, sur un plateau de tournage où je dois coordonner une dizaine, une vingtaine ou une trentaine de personnes en fonction des projets.
Ça, pour moi, c’est aussi un gros challenge. Au début, je me souviens de mon premier plateau de tournage. Il fallait driver l’équipe technique, il fallait driver les acteurs donc ce n’était pas évident. Mais à force de faire des tournages, à force de gérer des plateaux, on se sent de mieux en mieux et on arrive à trouver sa place.
On arrive à gagner aussi en crédibilité. Je me souviens de mes premiers pas en tant que réalisateur. Il fallait coacher les acteurs. Il faut essayer de leur de ramener vers toi, vers ton imagination, vers là ou tu veux les amener réellement. Mais la parole, elle est centrale là-dedans, lui dire, lui faire comprendre les émotions que tu souhaites avoir.
Après, il y a une relation qui se crée entre les créateurs et ces acteurs. Il y a une relation entre le réalisateur et son équipe technique et c’est vraiment ces liens humains que j’aimais beaucoup et que j’aime encore aujourd’hui. D’ailleurs, j’ai vraiment pris plaisir à améliorer ma parole ces dix dernières années pour mieux profiter de toutes ces situations que la vie professionnelle, en tout cas, m’offre.
Et avant, quand j’étais sur un plateau, j’étais stressé. Aujourd’hui, champ plateau. Un plaisir sans plaisir parce que le jeu, je me focalise sur la qualité de la rencontre. Je me focalise sur le moment qu’on passe ensemble. Pour moi, c’est un peu quand on est sur des projets comme ça, c’est un peu comme si tu pars en colo. C’est même s’il y a un challenge derrière, même s’il y a un client derrière.
Mais ça reste d’abord un plaisir avant tout de créer une œuvre de l’esprit. Les gens y voient la finalité. Sauf que moi, ce qui m’intéresse est de dire. Tiens, ce qu’on fait était parti de ma tête, c’était parti d’un bout de papier et là, ça prend forme. Et pour que ça prenne forme ? Il y a une dizaine, une quinzaine, une vingtaine de personnes, etc et c’est ça qui est un challenge.
C’est pour ça que j’aime énormément mon métier et pour passer de mon cerveau au bout de papier et arriver à cette finalité là que les auditeurs ou les spectateurs vont pouvoir voir tout ce chemin-là qui va se faire au fur et à mesure. Et ce chemin-là, il est coordonné également par la parole. Voilà pourquoi j’aime la parole.
Mazarine
C’est tout un cercle. Un moment, c’est un cycle.
Mike
C’est oui, c’est oui, c’est tout.
Mazarine
Un cercle que forcément, plus tu fais de tournage ou plus des rencontres de personnes au plus de responsabilités, au plus tu gagnes en confiance.
Mike
C’est exactement ça, c’est bien, c’est de l’entraînement et de l’entraînement. En gros, si je veux résumer la situation, dites-vous tout ce que je fais bien aujourd’hui, je l’ai planté au moins 100 fois avant. Je vous laisse réfléchir encore une fois. Là, par exemple, avant de faire ce podcast, je me suis planté au moins 99 fois avant parce que je ne savais pas m’exprimer pour X ou Y raisons.
Je l’ai fait, je l’ai fait, je l’ai fait. Si je donne un exemple tout bête, si je reprends l’exemple de ce podcast, vous imaginez bien qu’on n’a pas branché de micro et on a commencé à parler de ça. On a crée le podcast. Mazarine peut vous le confirmer.
Mazarine
Je préfère mentir ? Je dirais tout ça en une prise.
Mike
C’est possible.
Moi, je suis honnête, je suis encore là. Je pense d’aller en enfer. Mais en tout cas, moi, je ne sais pas. Mais par exemple, là, on a fait les premières prises. Il y avait des imperfections, les fameux mots facilitateurs, les fameux mots de remplissage. Et je me suis rendu compte que je disais énormément tu vois, tu vois, tu vois, tu vois, tu vois.
Et ça, j’ai pu me rendre compte avec l’auto écoute, j’ai pu me rendre compte avec tout, avec tout le travail que je fais autour de la parole. Et grâce à tout ce travail-là, je peux m’améliorer concrètement. Ce qui se passe, c’est que tu apprends. Ça fait partie de l’apprentissage. Tu fais quelque chose, tu analyses, tu vois. Est-ce que tu es fier ou pas du résultat ?
Si tu n’es pas fier, quelles sont les zones que tu améliores ? Moi. Je le fais exactement de la même façon au quotidien, ton perso que professionnelle. Je ne suis pas fier de moi, je n’aime pas ça, je suis, je ne suis pas satisfait. Qu’est-ce que je peux faire ? J’aime bien faire le parallèle, comme on dit. Il y a que les cons qui ne changent pas d’avis.
Et puis il y a des paresseux qui ne font pas d’efforts. Non, c’est un peu violent. Bon je la garde quand même et je les garde et j’assume. Enfin, j’essaye toujours de faire des efforts, j’essaye toujours de m’améliorer et ça fait partie de mon process mental.
Mazarine
Eh bien, c’est déjà la fin de cet épisode et de cet échange. Merci Mike pour ce retour d’expérience et pour cette conversation très enrichissante.
Mike
Merci Mazarine
Mazarine et merci à vous, chers auditeurs, pour vos retours, vos commentaires. Sachez qu’on dit tout et ça nous fait très plaisir. Et on se retrouve la semaine prochaine pour un nouvel épisode. Demain, réveil.